Définition :
C'est une anomalie de développement de la hanche qui mène éventuellement à la dégénérescence de celle-ci. La hanche normale se présente comme une boule et une cavité ressemblant à une attache de caravane. Lors de la dysplasie de la hanche, l'articulation est souvent peu profonde et la tête fémorale est petite et déformée. La dysplasie de la hanche est une maladie complexe dont les causes ne sont pas totalement éclaircies, bien que différents facteurs de risque aient été identifiés.
Caractère héréditaire :
On estime actuellement à 50 % les facteurs d'hérédité pouvant s'exprimer par l'apparition d'une dysplasie. Il semble néanmoins que les facteurs d'environnement influencent fortement son aggravation.
Croissance et gain de poids rapide et précoce :
Les chiens à croissance rapide sont beaucoup plus sensibles à cette pathologie que les autres .
Alimentation :
Elle joue un rôle prépondérant soit par un excès de minéraux, de vitamines, soit par un excès de calorie entraînant une surcharge pondérale et une sollicitation plus importante de l'articulation, d'où sa déformation.
Activité :
En permettant au chien une activité sportive trop importante pendant sa période de croissance, la sollicitation articulaire et osseuse exagérée peut favoriser une dysplasie coxale fémorale.
Musculature :
A l'inverse, une forte musculature du bassin peut compenser les faiblesses ligamentaires et masquer une dysplasie. En citant ces diverses causes prédisposantes, nous comprenons que l'excès peut nuire autant que l'insuffisance et qu'un régime soigneusement équilibré associé à une activité bien menée sera primordiale.
Prédispositions raciales :
De tous ces facteurs découle une sensibilité plus ou moins forte selon la race. Les races lourdes à croissance rapide payeront le plus lourd tribu à cette affection (léonberg, terre neuve, saint bernard, bull mastiff etc.). Les races légères et musclées seront moins atteintes (lévrier, berger belge, pointer).
Symptômes
Ils varient beaucoup en fonction de l'âge du chien.
Moins de trois mois :
Il est très rare de voir des symptômes, mais le chiot fortement atteint peut paraître maladroit à cause de l'instabilité de la hanche.
De trois à six mois :
Cette instabilité s'aggrave et la démarche du chiot devient de plus en plus chaloupée, les premières douleurs surviennent, elles peuvent déjà être mises en évidences par l'hyper extension forcée.
De six mois à un an :
Les douleurs occasionnent des boiteries unilatérales ou bilatérales en en fonction de l'atteinte. Le chien montre un début d'ankylose et une réticence à l'effort, souvent le train arrière est amaigri et le bassin anguleux.
De un an à six, sept ans :
Les symptômes peuvent s'estomper, voire même disparaître, le chien, toujours en fonction du degré de dysplasie peut mener une vie tout à fait normale s'il n'y a pas d'excès d'activité.
Au dessus de sept ans :
Les signes d'arthrose sont apparus et le chien peut se remettre à boiter surtout après un effort. Il peut, si les lésions sont importantes, boiter en continu dans les dernières années de sa vie. Il restera néanmoins toujours capable de se lever, l'arthrose n'a jamais paralysé un chien !
Diagnostic :
Le seul critère objectif de la dysplasie coxale fémorale est la radiographie du bassin. Pour être interprétable, cette radiographie doit être pratiquée selon un processus bien défini : ce protocole nécessite l'anesthésie du chien, un positionnement bien particulier et une image radiologique parfaite. Sur une radio, on évalue la coaptation de la tête du fémur dans l'acétabulum (c'est à dire la façon dont elle s'emboîte dans la cavité).
Ci-dessus, radio des hanches : dysplasie stade A
POSITION POUR RADIO
Stade A :
aucun signe de dysplasie.
Stade B :
stade intermédiaire : mauvaise coaptation tête fémorale/acétabulum; angle Norbert Olson > 105°.
Stade C :
Dysplasie légère : mauvaise coaptation avec angle Norbert Olson > 100°.
Stade D :
Dysplasie moyenne : mauvaise coaptation avec signe d'arthrose.
Stade E :
Dysplasie grave : luxation ou subluxation de la tête fémorale avec arthrose.
Bassin normal :
- La tête du fémur est grande, ronde et s'adapte parfaitement dans la cavité.
- Le col du fémur est bien dessiné et ses contours sont lisses.
- Les rebords de la cavité sont lisses.
- L'acétabulum (cavité) est profond et couvre plus de 50 % de la tête du fémur.
- L'espace articulaire entre la boule et la cavité est égal dans toutes sa longueur, car elles s'imbriquent étroitement l'une dans l'autre.
Bassin légèrement dysplasique :
- La tête du fémur est relativement petite et aplatie : elle ne correspond pas à la cavité.
- Le col du fémur n'est pas clairement discernable de la tête.
- Les rebords de la cavité deviennent légèrement irréguliers (signe précoce de l'arthrose).
- L'acétabulum (cavité) est peu profond et couvre moins de 50 % de la tête du fémur.
- L'espace articulaire entre la boule et la cavité est large et inégal à cause de la mauvaise imbrication des deux élément (instabilité et sub-luxation).
Bassin arthrosique :
- La tête et le col du fémur sont très déformés et il est très difficile de distinguer l'un de l'autre. Les bords sont rugueux à cause de la déformation d'ostéopytes.
- Les rebords de l'acétabulum sont devenus irréguliers et apparaissent plus blanc sur une radiographie à cause de la formation d'os nouveau autour de l'articulation (ostéophytes).
- L'espace articulaire est devenu extrêmement irrégulier, car la tête du fémur et l'acétabulum ont perdu du cartilage. Une perte complète de cartilage s'accompagne de douleur.
Dépistage précoce de la dysplasie coxo-fémorale
Indications, procédés, résultats
Pr. Jean-Pierre GENEVOIS
1-Introduction, Indications.
La dysplasie de hanche est la cause de boiterie des membres postérieurs la plus fréquente chez le chien. Elle est caractérisée par une laxité excessive de l’articulation coxo-fémorale, susceptible de déboucher sur une anomalie de conformation de cette articulation. Elle va souvent de pair avec une coxarthrose (arthrose de la hanche) plus ou moins précoce, qui peut se révéler rapidement invalidante pour l’animal. Le dépistage officiel de la dysplasie de la hanche relève d’un protocole bien défini, qui implique que l’animal soit âgé au minimum de 12 mois. Cet état de fait n’est pas contradictoire avec la possibilité de pouvoir rechercher, et éventuellement diagnostiquer, l’affection de manière précoce. Dans le cadre de l'élevage, le
dépistage précoce permet d'avoir une idée plus rapide du devenir potentiel des hanches d'un animal donné. Au plan individuel, chez les races à haut risque, si la dysplasie est dépistée précocement, la prise en charge thérapeutique de l’animal est meilleure, et l’on dispose d’un plus large choix thérapeutique. Le diagnostic précoce de la dysplasie se base sur des critères cliniques (examen orthopédique) et radiographiques. Il est envisageable dès l'âge de 16 semaines.
2-Procédés, résultats.
2-1 Examen clinique :
il doit être méthodique et rigoureux. On cherche à dépister une éventuelle douleur lors de la mise en hyperextension, en abduction, et en abduction-extension de l’articulation oxofémorale (chez l'animal dont les hanches sont saines, ces manipulations sont non douloureuses). Dans un second temps, on cherche à mettre en évidence le signe d’Ortolani, qui signe l’existence d’une laxité articulaire anormale. Une étude (ADAMS, JAAHA 1998) a montré que 70% des animaux présentant un signe d’Ortolani positif entre 16 et 20 semaines présentent des signes d’arthrose de la hanche à 12 mois. La présence du signe d’Ortolani n’est, par contre, pas toujours systématique chez l'animal dysplasique, notamment chez l’animal vigile (= sans préparation médicamenteuse permettant le relâchement musculaire). Dans la même étude, près de 37% des animaux arthrosiques à un an ne présentaient pas de signes d’Ortolani à l'âge de 16 à 20 semaines.
L’absence de signe d’Ortolani ne permet donc pas d’exclure l’existence d’une dysplasie de la hanche chez un animal jeune. La réalisation de cette manoeuvre sous anesthésie générale augmente sa fiabilité. Chez l'animal à risque, il convient de la répéter au cours de la croissance, car le pourcentage de faux négatifs chute de manière importante (il n'est plus que de 7%) chez les animaux âgés de 50 semaines environ.
2-2 Examen radiographique standard : chez l’animal jeune, la radiographie standard (= la même que celle utilisée chez l’adulte pour le dépistage officiel) permet parfois de mettre en évidence une sub-luxation marquée des têtes fémorales. Il arrive que cette dernière soit associée à des déformations osseuses et/ou des signes d’arthrose. Dans ces conditions, le diagnostic de dysplasie coxo-fémorale peut être avancé, quel que soit l’âge de l’animal. Si la radiographie standard est normale, il est par contre impossible d’avoir une idée précise de
l’état des hanches, car la laxité articulaire est souvent masquée sur ce type de cliché, d’autant que le rebord acétabulaire dorsal n’est pas encore complètement ossifié. Des études (ADAMS, JAAHA 1998 & ADAMS, Vet Radiol Ultrasound, 2000) montrent par exemple que 60% des animaux considérés comme normaux entre 16 et 20 semaines ont développé des signes d’arthrose à l’âge de 12 mois. On estime que, sur une simple radiographie standard réalisée à l’âge de 6 mois, 40% des animaux dysplasiques sont considérés comme normaux. La sensibilité du procédé augmente avec l’âge, mais, d’après les partisans des radiographies en position forcée, elle reste imparfaite, avec près de 20% de faux négatifs à l’âge de 1 an. L’obtention d’une profonde myorelaxation, au moment de la réalisation de la radiographie, est un préalable indispensable si l’on veut limiter le taux de faux négatifs. Chez le jeune comme chez l’adulte, il est souhaitable que le recouvrement dorsal de la tête fémorale atteigne ou dépasse 50% de la surface de cette même tête fémorale sur la radiographie. Il faut prendre garde à la qualité du positionnement, toute rotation du bassin modifiant le pourcentage de couverture et la valeur de l’angle de Norberg-Olsson. Chez l’adulte, la valeur idéale de l’angle de Norberg Olsson est de 105° (ou supérieure à cette valeur), ce qui prouve l’existence d’une bonne coaptation de la tête fémorale dans l’acétabulum. Les valeur de l’angle de Norberg-Olsson n’ont pas fait l’objet d’études précises chez le chien en croissance. Il est possible
qu’à un âge donné, cet angle idéal soit variable en fonction des races. On considère généralement (de manière empirique) que les valeurs utilisées chez le chien adulte sont « valables » à partir de 6-8 mois.
2-3 Examens radiographiques spécifiques: Compte tenu des limitations de la radiographie standard, un certain nombre de méthodes plus spécifiques ont été mises au point pour mettre en évidence de manière fiable, et pour quantifier, une éventuelle laxité articulaire. Il s'agit des "radiographies en contrainte", également appelées "radiographies en position forcée", ou radiographies "en distraction" (de l'anglais "to distract" = écarter).
Ces procédés consistent à forcer les têtes fémorales à se déplacer latéralement, afin de mettre en évidence, puis de mesurer, la laxité articulaire. Le plus connu est le procédé PennHip, mis au point en 1990 par Gail SMITH. Il nécessite la réalisation de trois vues : l’une en position standard, la seconde "en compression" et la dernière en « distraction ». Pour les deux derniers clichés, l’animal est en décubitus dorsal, les fémurs perpendiculaires à la
table, en très légère abduction. Les tibias sont horizontaux et les postérieurs sont manipulés par l'intermédiaire des jarrets. Le cliché "en compression" est réalisé en pressant fortement la région du grand trochanter (par l'intermédiaire de coussins de mousse), en direction de l'acétabulum. Le cliché "en distraction" nécessite l’utilisation d’un appareillage (le « distracteur »), composé de deux colonnes radiotransparentes, dont on peut faire varier l'écartement. Il est intercalé entre les cuisses de l'animal. L'écartement des barres est réglé en fonction de la distance séparant les deux têtes fémorales sur le cliché de dépistage standard, mesurée préalablement à la manoeuvre. En rapprochant les grassets de l’animal l'un vers l'autre, de part et d'autre des barres du distracteur, ces dernières font contre-appui sous les têtes fémorales, qui sont ainsi déplacées latéralement. L'indice de distraction est calculé en mesurant le déplacement du centre de la tête fémorale entre le cliché en compression et
le cliché en distraction, puis en divisant cette mesure par le rayon de la tête fémorale. Il varie de 0 à 1 (0 pour des hanches très stables, 1 pour des hanches totalement luxées). L’indice de distraction est un bon indicateur de la probabilité pour un animal de développer une arthrose des hanches par la suite. Un chien qui présente un indice de distraction inférieur ou égal à 0,3 a une très forte probabilité de rester indemne de coxarthrose. Un indice supérieur à 0,7 est associé à un très fort risque d’arthrose. Entre 0,3 et 0,7 il est plus difficile d’estimer ce risque,
qui est fortement lié à la race de l’animal, certaines races présentant une meilleure « tolérance » à la laxité articulaire. En toute logique, l’indice de distraction d’un individu devrait donc être rapporté à la moyenne des indices mesurés au sein de sa race. Le procédé PennHip est une excellente méthode de détection de la laxité de hanche dès l’âge de 4 mois. La mesure de l’angle de Norberg-Olsson, sur la vue en distraction, est également un bon indicateur du risque d’arthrose : chez des animaux âgés de 16 à 20 semaines, aucun des chiens présentant un angle de Norberg-Olsson supérieur à 91° sur la vue en distraction n’a développé d’arthrose. A l’inverse, 92% des animaux présentant un angle de Norberg-Olsson inférieur à 85° à cet âge ont développé une coxarthrose à 12 mois. Le procédé PennHip est breveté, et la mesure de l’indice de distraction doit se faire théoriquement aux USA, ce qui limite considérablement son utilisation en pratique courante.
Aldo VEZZONI a mis au point un « distracteur » légèrement moins perfectionné, commercialisé par l’intermédiaire de la FSA (Fondazione Sante Animale) en Italie, et dont l’utilisation est libre de droits. Pour des raisons de commodité plus grande, c'est donc ce distracteur qui est généralement utilisé pour effectuer des clichés en contrainte dans notre pays. Enfin, Mark FLÜCKIGER a décrit une technique de « distraction » qui ne fait appel à aucun dispositif particulier. Pour cela l’animal est positionné comme pour le procédé PennHip.
Avant de prendre la radiographie, une poussée en direction dorsale est exercée sur les fémurs, dans l’axe de la diaphyse fémorale. En cas d’hyperlaxité, les têtes fémorales se mettent à l’appui sur le rebord acétabulaire dorsal (comme lors de recherche de signe d’Ortolani). Un indice de subluxation, similaire à l’indice de distraction du procédé Pennhip, peut alors être déterminé.
Dépistage précoce de la dysplasie coxo-fémorale, indications, procédés, résultats
Pr. Jean-Pierre GENEVOIS
11èmes Rencontres éleveurs canins /vétérinaires
Congrès National AFVAC Nantes Jeudi 28/11/2013